|
|
|
|
|
Boutade et kalachnikov
29/12/2013 00:15
Boutade et Kalachnikov
Deux faits ont retenu mon attention cette semaine auxquels je consacre ma réflexion de ce week-end. Il s'agit de la «boutade» de François Hollande contre l'Algérie et de la mort de l'inventeur de la Kalachnikov.
Le peuple algérien et ses responsables ont eu un drôle de cadeau de Noël de la part de l’Élysée et par la bouche de son chef Hollande. La nouvelle a fait le tour du monde particulièrement dans les médias et les milieux diplomatiques. En fait, ce que l’Élysée qualifie diplomatiquement et avec mépris de «boutade» n'en est pas une. Cette façon de faire est symptomatique de la manière dont la France officielle considère et traite depuis toujours l'Afrique et ses dirigeants en dehors des micros. Quand régulièrement nous disons que la France n'aime l'Afrique et ses dirigeants que parce qu'ils l'aident à piller davantage ses ressources, il se trouve encore d'autres qui nous traite d'aigris. Dans cette affaire de «boutade» mal digérée par Alger, nous devons y voir une fois de plus le mépris que la France a pour les États africains et leurs institutions. Sinon, de tels propos n'auraient jamais été tenus envers un pays responsable et souverain. En effet, demander à son ministre s'il est rentré «sain et sauf» de l’Algérie qui n'est pourtant pas à feu et à sang comme le sont la Centrafrique, le Mali et le Soudan du sud aujourd'hui, c'est se moquer et mépriser les Algériens et leurs institutions. C'est dans le pire des cas souhaiter ce triste sort à l'Algérie alors qu'il y a seulement quelques jours Hollande a lui même rassemblé ses sous préfets pour leur donner un cours magistral de «défense» et de «sécurité» africaines. Hollande voulait signer des accords d'intérêts économiques avec Alger. Cela a été fait, et bien fait par son ministre rentré «sain et sauf». Cela lui suffit. Il ne peut que, pour la suite, se moquer d'un peuple devant caméras et micros sous les rires approbateurs de ses ministres et du reste de son auditoire complices de tels propos. Face aux «réactions» algériennes, on nous dit que le sieur Hollande, dans un communiqué, a exprimé ses «sincères regrets pour l'interprétation qui est faite de ses propos et en fera directement part au président Boutéflica»! Il est clairement dit ici que Hollande ne regrette pas ses propos. Il regrette et s'en prend plutôt aux interprétations faites de ses propos! C'est le comble. Même si nous devons comprendre la facilité avec laquelle les autorités algériennes ont accepté ce regret spécial de l’Élysée, on doit aussi comprendre que Hollande ne regrette point sa «boutade». Pour lui cela est normal de parler ainsi d'un pays que la France n'a pas pu mettre sous sa coupe comme la Côte d'Ivoire et ses autres colonies. Il peut même reprendre ses mêmes propos à l'encontre d'autres pays et de leurs institutions – Comme il le fait d'ailleurs bien souvent à la suite de ses prédécesseurs. Ce «dérapage verbal» méprisant traité à Alger de «Hollânerie» doit faire réfléchir des chefs d’État comme le nôtre qui préfèrent faire la courbette à Élysée plutôt que de respecter et de lutter pour la promotion, la dignité et l'honneur de leur peuple pris dans l'engrenage de la pauvreté et de la misère. L'«Hollânerie» fait partie intégrale du programme de l’Élysée pour l'Afrique et ses chefs. Souvent les discours officiels le montrent bien quoique subrepticement. C'est de cette façon que la France officielle traite l'Afrique et les Africains dans les coulisses, les salons de thé et les salles à manger de l’Élysée et de temps en temps publiquement comme la dernière fois. Comme toujours, il revient aux Africains de prendre leur responsabilité pour se faire respecter.
L'autre actualité qui a fait aussi le tour du monde est la mort, à 94 ans, de Mikhaïl Kalachnikov, le Russe inventeur du mystérieux fusil d'assaut qui porte son nom: Kalachnikov ou Avtomat Kalachnikov 1947 ou encore AK-47. Les spécialistes disent que ce fameux fusil a été fabriqué à plus de cent millions d'exemplaires qui courent encore dans le monde et ses maquis. Faut-il être fier ou triste de la mort du père kalachnikov? Chacun donnera sa réponse en scrutant son âme et sa conscience. L'intéressé lui-même dit qu'il préférerait avoir inventé une tondeuse pour faciliter le travail des paysans: « Je suis fier, dit-il, de mon invention mais triste qu'elle soit utilisée par des terroristes »! Personnellement, je soutiens qu'une telle invention fait partie des échecs de la science moderne. Inventer une arme pour éliminer l'espèce humaine, c'est être contre la volonté de Dieu de protéger cette espèce humaine, fruit de sa création. La horde de rebelles qui ont envahi notre pays et qui se pavanent au sommet de l'Etat aujourd’hui, tous les autres rebelles que regorgent le monde aujourd'hui, ont pour arme d'assaut principal et comme voie unique d'expression cette fameuse kalachnikov. J'ai vu ces rebelles ivoiriens manipuler cette arme pour tuer les hommes, les femmes et les enfants. J'ai aussi vu des gamins les manipuler et tuer leurs aînés. Moi-même, cette arme a été pointée sur moi quand les rebelles ont envahi Daloa en 2011. fort malheureusement la kalachnikov est aujourd'hui le moyen d'enrichissement rapide surtout en Afrique. J'en veux pour preuve les Soro et autres qui l'ont préférée aux livres et stylos et qu'on compte aujourd'hui parmi les plus riches de la planète qui défient et narguent nos universitaires. Cette triste arme est tristement le gagne-pain de beaucoup d'Africains et Ivoiriens aujourd'hui. Beaucoup rêvent d'en posséder par tous les moyens pour donner un sens à leur vie.
Peut-on être fier d'avoir inventé une telle chose affreuse et abominable? Peut-on être fier de mourir à 94 ans quand notre invention a mis fin à la vie de nombreux enfants qui n'avaient pas encore un an? Doit-on célébrer une telle invention et son initiateur ou au contraire devait-on en avoir grande honte? Il y a des inventions qui doivent faire honte à l'humanité quel que soit leur haut degré de génie. L'intelligence humaine ne doit pas aller contre la vie et l'espèce humaines. Au contraire elle doit les promouvoir et les protéger. La kalachnikov s'oppose et défie la «civilisation de l'amour» chère à Jean-Paul II. Elle défie l'amour et contribue à l'extermination du genre humain. Elle sonne guerre, misère, galère, coups d’État, rébellion, braquage.
Si Mikhaïl Kalachnikov est mort, pourquoi ne pas profiter pour faire disparaître sa triste invention avec lui?
| |
|
|
|
|
|
|
|
Quand la France sécurise et défend l'Afrique
21/12/2013 16:29
Quand la France sécurise et défend l'Afrique
La France en Centrafrique; ça pue encore une odeur de françafrique. Une françafrique nouveau modèle et nouveau format, revue et corrigée, taillée sur mesure. Hollande avait juré et signé de façon unilatérale que la françafrique était bel et bien morte. Il a fallu que nous soyons des idiots et des ignares prêts à ne rien comprendre pour croire en cette chanson insensée et lancer des dithyrambes au prince de l’Élysée fraîchement élu mais mal aimé chez lui. Heureusement que je fus de ceux qui n'y ont point cru. Car signer et déclarer la fin de la françafrique, c'est signer de facto et de façon violente la fin du pillage, de l'exploitation et de la violence tous azimuts de la France dans son éternel pré carré. Ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Ceux qui y ont cru n'ont que leurs yeux pour pleurer aujourd'hui leur ignorance. En convoquant dare-dare ses sous-préfets à l’Élysée les 6 et 7 décembre derniers, le sieur Hollande voulait bien les rappeler à l'ordre et recadrer ceux d'entre eux qui ont été tentés de prendre quelque liberté vis-à-vis du chef; ceux qui veulent se sécuriser et se défendre eux-mêmes. Pour ce sommet, tout fut mis en l’œuvre pour que les élèves soient bien mis au pas. Tous les sous-préfets devraient être présents pour recevoir la feuille de route sécuritaire de l'Afrique. Une leçon magistrale de «défense» et de «sécurité» fut donné par le sécurocrate en chef des tropiques. Faut-il que nous nous réjouissions ou que nous pleurions parce que tout un continent comme l'Afrique a ses clefs de sécurité et ses poudrières à l’Élysée, bien gardées par le chef? Faut-il que nous soyons fiers de nous-mêmes parce que la France se rend toujours disponible à envahir notre continent pour y mettre de l'«ordre» à notre place? Le drame dans cette honteuse affaire de «défense» et de «sécurité» c'est qu'elle se déroule au moment même où nous pleurions celui qui a lutté pour toute l'Afrique afin que les Noirs ne soient plus soumis à la domination des Blancs, aussi puissants fussent-ils. Si ceux qui prétendent nous diriger avaient encore quelque dignité, ils auraient sinon annulé cette honteuse rencontre du moins la reporter pour porter fièrement le deuil de cet illustre homme africain que fut Mandela. Mais il fallait aller répondre à la convocation du chef au risque de se faire évincer de son fauteuil présidentiel. Malheureusement, ils sont nombreux ceux qui croient qu'il suffit que Hollande parle pour que la sécurité et la défense adviennent en Afrique. Pourtant, sous nos yeux, nous voyons bien que la France est allée en Libye, et il n'y a pas de sécurité. Il y a la guerre. Elle est venue en Côte d'Ivoire, chez nous, il n'y a que des dozos, ruines et misères. Elle a fait un tour au Mali pour chasser les méchants islamistes, le désert en regorgent encore et non des moindres. Le constat est que partout où la France est passée, tout a trépassé. Alors, de quelle sécurité et de quelle défense nous parle-ton avec tant d'arrogance et de mépris? Je n'ai pas pu supporter cette image de nos chefs d’État assis comme en classe devant Hollande en train de recevoir de lui un cours de «défense» et de «sécurité».
Prétendre sécuriser et défendre l'Afrique, c'est bien évidemment, pour la France, étendre son hégémonie et son impérialisme barbares en Afrique. Si elle s'acharne tant à nous «sécuriser» et à nous «défendre» à notre corps défendant, ce n'est pas tant qu'elle nous aime que parce qu'elle veut être libre pour mieux piller et maintenir ou installer ses sous-préfets soumis. Si la France ne voulait pas de «carnage» en Centrafrique, elle n'aurait pas dû soutenir son mentor Michel Djotodia chasser du palais Bozizé avec la bénédiction du lugubre voisin tchadien. Avec ce qui se passe en Afrique depuis 2011, disons tout net que la France est en guerre feutrée contre l'Afrique grâce à la bénédiction de ses réseaux aussi bien à l’Élysée qu'en Afrique même. Il n'y a que ses sous-préfets qui profitent de ses turpitudes pour favoriser une telle humiliation et la laisser prospérer. Il y a de grands marchés et de grandes affaires à protéger. Au cœur de la françafrique nouveau modèle, il y a tout un jeu d'intérêts qui n'est pas différent de l'ancienne françafrique. «Pourtant, révèle Pierre Péan, les pratiques de financement occulte se perpétuent; elles se déroulent dans un espace bien particulier, en marge du sommet de l'Etat français, mettent aux prises des hommes politiques du parti au pouvoir, des grands commis de l'Etat, des patrons de quelques fleurons industriels nationaux et des intermédiaires. Il arrive fréquemment que l'on fasse appel aux services d'un chef d’État africain ou arabe...» (Cf. Pierre Péan, La république des mallettes, Paris, Fayard, 2011, p.18). Cette façon pour l’Élysée de gérer les affaires africaines est bel et le bien la françafrique dont le sieur Hollande ne veut pas entendre parler. Le sort de l'Afrique se trouve ainsi scellé, même cadenassé par un groupuscule d'affairistes qui fourmillent à l’Élysée et qui agissent à travers des réseaux mafieux qui pillent l'Afrique et créent la pauvreté dans un continent pourtant riche.
Ce n'est pas par amour que la France semble tant se soucier de la défense et de la sécurité de l'Afrique. C'est par pur intérêt. Et c'est bien de cette façon qu'elle a toujours fonctionné avec l'Afrique. Pour nous faire comprendre cela, Sarkozy, sur nos propres terres, nous avait dit que nous n'avons pas d'Histoire ou que nous ne sommes pas encore rentrés dans l'Histoire. Or un peuple sans Histoire, est un non peuple. Ceci justifie donc cela! Dire que d'illustres africains ont applaudi et soutenu un tel discours! Pour l'Afrique, les données vis-à-vis de l'ancienne colonie seront toujours les mêmes: se laisser tenir et dominer comme un bébé.
| |
|
|
|
|
|
|
|
Mandela ou l'honneur de la liberté
13/12/2013 23:16
Mandela ou l'honneur de la liberté
Au nom de notre foi ne peut pas rester indifférent à l'hommage planétaire rendu en ce monument que fut Nelson Mandela. Je lui dédie donc le numéro de ce jour. Mais pour ne pas avoir à dire des choses contre la volonté de l'homme, comme c'est malheureusement le cas depuis l'annonce de sa mort, en considérant sa grande humilité, j'ai choisi de le faire parler lui-même. Ainsi, j'ai relevé quelques paroles fortes dans son livre autobiographique pour que l'on apprenne à le connaître par lui-même et non par des discours hypocrites qui fusent aujourd'hui dans le monde entier en faveur d'un homme qui a été traité de «terroriste» et condamné à finir ses jours en prison. Le mensonge et l'hypocrisie des puissants de ce monde vis-à-vis de Mandela est tellement flagrante aujourd'hui que tout le monde s'en rend bien compte. Écoutons alors Nelson Mandela parler de lui-même, de ses maîtres, de son engagement pour la libération de ses frères noirs, de sa famille. (Cf. Nelson Mandela, Un long chemin vers la liberté, Paris, Fayard, 2013, 768p. ) Un livre que je vous conseille vivement comme guide politique et socle d'engagement social.
Le mépris d'une culture: « Le premier jour de classe, mon institutrice, Miss Mdingane, nous a donné à chacun un prénom anglais et nous a dit que dorénavant ce serait notre prénom à l'école. A cette époque, c'était la coutume, sans doute à cause de la prévention des Britanniques envers notre éducation. Celle que j'ai reçue était britannique et les idées britanniques, la culture britannique, les institutions britanniques étaient censées être supérieures. La culture africaine n'existait pas. Les Africains de ma génération – et encore ceux d'aujourd'hui – ont en général un prénom anglais et un prénom africain. Les Blancs ne pouvaient ou ne voulaient pas prononcer un prénom africain, et ils considéraient qu'en porter un était non civilisé. Ce jour-là, Miss Mdingane m'a dit que mon nouveau prénom serait Nelson (…) (p.20-21).
Aux jeunes africains d'aujourd'hui: (…) «J'allais à l'école, qui n'avait qu'une seule classe, à côté du palais, et j'apprenais l'anglais, le xhosa, l'histoire et la géographie. Nous faisions nos devoirs sur une ardoise. Nos instituteurs, Mr. Fadana, et, plus tard, Mr. Giqwa, me portaient un intérêt particulier. Je réussissais bien, moins par facilité que par obstination. La discipline que je m'imposais était renforcée par ma tante Phathiwe qui habitait à la Grande Demeure et qui, chaque soir, contrôlait mon travail» (p.25).
Un racisme masqué: (…) «Le premier jour, une agréable jeune secrétaire blanche, Miss Lieberman, me prit à part et me dit: «Nelson, il n'y a pas de barrière de couleur dans le cabinet.» Elle m'expliqua qu'en milieu de matinée celui qui préparait le thé arrivait avec un plateau et un certain nombre de tasses. «En l'honneur de votre arrivée, nous avons acheté deux tasses neuves pour vous et pour Gaur, dit-elle. Les secrétaires portent le thé aux avocats mais vous et Gaur, vous prendrez votre thé vous-mêmes, comme nous. Je vous appellerai quand le thé arrivera et vous pourrez le prendre dans les tasses neuves.» Elle ajoutait que je devais transmettre ce message à Gaur. Je lui étais reconnaissant pour toutes ses attentions, mais je savais que les «deux tasses neuves» qu'elle avait pris tant de soin à mentionner étaient la preuve de la barrière de couleur qui, d'après elle, n'existait pas. Les secrétaires partageaient peut-être le thé avec deux Africains, mais pas les tasses pour le boire» (p.91).
Le mépris du noir: (…) «Un après-midi que je rentrais à Alexandra par le bus, je me suis assis à côté d'un type de mon âge. C'était un de ces jeunes qui portaient des costumes imitant ceux des gangsters américains du cinéma. Je me suis rendu compte que ma veste touchait la sienne. Il l'a remarqué lui aussi et s'est prudemment écarté pour que je ne puisse pas le salir. Quand j'y repense, je pense que c'était un geste mesquin et comique, mais pénible sur le moment» (pp. 97-98).
La vie dans le ghetto : (…) «Malgré mes faiblesses sur le plan sentimental, je me suis progressivement adapté à la vie dans le township, et j'ai commencé à prendre conscience d'une certaine force intérieure, à croire que je pouvais très bien me débrouiller en dehors du monde dans lequel j'avais grandi. J'ai découvert lentement que je ne devais pas compter sur mon appartenance à la famille royale ni sur son soutien pour avancer et j'ai noué des relations avec des gens qui ignoraient mon ascendance royale ou que cela n'intéressaient pas. J'avais mon propre chez-moi, aussi humble soit-il, et je sentais naître en moi la confiance et l'indépendance nécessaires pour voler de mes propres ailes» (pp.102-103)
Observateur de l'engagement des autres:(…) «Ce qui me faisait l'impression la plus profonde, c'était l'engagement total de Gaur dans la lutte de libération. Il vivait et respirait la recherche de la liberté. Parfois, Gaur assistait à plusieurs meetings dans la même journée, où il était un des principaux orateurs. Il me semblait penser qu'à la révolution. Je l'accompagnais aux meetings du Conseil consultatif du township et à ceux de l'ANC. J'y allais en tant qu'observateur, pas en tant que participant, car je ne pense pas y avoir jamais parlé. Je voulais comprendre les questions dont on débattait, j'évaluais les arguments, je voyais l'envergure des hommes impliqués» (p.108).
La naissance d'un engagement: (…) «Je suis incapable d'indiquer exactement le moment où je suis devenu politisé, le moment où j'ai su que je consacrerais ma vie à la lutte de libération. Être Africain en Afrique du Sud signifie qu'on est politisé à l’instant de sa naissance, qu'on le sache ou non. Un enfant africain naît dans un hôpital réservé aux Africains, et il va dans une école réservée aux Africains, si toutefois il va à l'école. Quand il grandit, il ne peut occuper qu'un emploi réservé aux Africains, louer une maison dans un township réservé aux Africains, voyager dans des trains réservés aux Africains et on peut l'arrêter à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit pour lui donner l'ordre de présenter un pass, et s'il ne peut pas, on le jette en prison. Sa vie est circonscrite par les lois et les règlements racistes qui mutilent son développement, affaiblissent ses possibilités et étouffent sa vie. Telle était la réalité et on pouvait l'affronter de milliers de façons. Je n'ai pas connu d'instant exceptionnel, pas de révélation, pas de moment de vérité, mais l'accumulation de milliers d'affronts, de milliers d'humiliations, de milliers d'instants oubliés, a créé en moi une colère, un esprit de révolte, le désir de combattre le système qui emprisonnait mon peuple. Il n'y a pas eu de jour particulier où j'aurais dit: à partir de maintenant je vais me consacrer à la libération de mon peuple; à la place je me suis simplement retrouvé en train de le faire sans pouvoir m'en empêcher. J'ai mentionné beaucoup de gens qui m'ont influencé mais j'étais de plus en plus sous la tutelle prudente de Walter Sisulu. Walter était fort et raisonnable, pratique et dévoué. Il ne perdait jamais la tête dans une crise; il restait souvent silencieux quand les autres criaient et hurlaient. Il croyait que l'ANC était un moyen pour créer des changements en Afrique du Sud, une organisation dépositaire des espoirs et des aspirations des Noirs» (pp. 117-118).
L'optimisme du combattant: (…) «Je suis fondamentalement optimiste. Je ne sais si cela vient de ma nature ou de ma culture. Être optimiste c'est en partie avoir la tête dirigée vers le soleil et le pieds qui continuent à avancer. Il y eut beaucoup de moments sombres quand ma foi dans l'humanité était mise à rude épreuve, mais je ne voulais ni ne pouvais me laisser aller au désespoir. Cette voie mène à la défaite et à la mort.» (p.474).
(…) En tant que prisonnier du groupe D, je n'avais droit à recevoir qu'une seule visite et à écrire qu'une seule lettre tous les six mois. Je trouvais qu'il s'agissait d'une des restrictions les plus inhumaines du système carcéral. La communication avec sa famille est un des droits de l'homme... Les visites et les lettres étaient limitées aux parents de «premier degré». Nous ne trouvions pas cette restriction seulement pénible mais aussi raciste. Le sens africain de la famille proche est très différent de celui qu'en ont les Européens et les Occidentaux. Pour nous, les structures familiales sont plus vastes et plus inclusives... En prison, il y a pis que les mauvaises nouvelles de sa famille, c'est l'absence totale de nouvelles. Il est toujours plus difficile d'affronter les malheurs et les tragédies qu'on imagine que la réalité même menaçante ou désagréable» (p.484). (…) «Je n'avais jamais imaginé que la lutte serait courte ou facile. Pendant les premières années sur l'île, il y eut des moments pénibles pour l'organisation à l'extérieur et presque tout l'appareil clandestin du mouvement fut détruit. On avait découvert et anéanti nos structures; ceux qui n'avaient pas été arrêtés se sauvaient pour garder une tête d'avance sur l'ennemi. Virtuellement, chaque responsable important de l'ANC était en prison ou en fuite» (p.532).
Le combattant face à ses drames et interrogations: (…) «La mort de sa mère amène chaque homme à se retourner sur son passé et à faire le bilan de sa vie. Les difficultés et la pauvreté qu'avait connues ma mère m'amenèrent à me demander une nouvelle fois si j'avais pris le bon chemin. Toujours la même question: avais-je bien choisi en plaçant le bien-être du peuple avant celui de ma propre famille? Pendant longtemps, ma mère n'avait pas compris mon engagement dans la lutte. Bien que ma famille n'eût pas voulu y être entraînée, mon engagement l'avait pénalisée» (p.540).
La famille du combattant: (…) «Il n'y avait rien de plus angoissant que de savoir Winnie elle aussi en prison. J'essayais de faire bonne figure, mais intérieurement j'étais très troublé et très inquiet. Rien ne menaça plus mon équilibre que l'époque où Winnie se trouva en isolement. J'avais beau pousser les autres à ne pas s'inquiéter pour ce qu'ils ne pouvaient pas contrôler, j'étais incapable de suivre mes propres conseils. Je passais beaucoup de nuits blanches. Qu'est-ce que la police faisait à ma femme? Comment supportait-elle cela? Qui s'occupait de nos filles?» (p.541).
Ces quelques notes venant de lui-même révèlent Nelson Mandela tel qu'il est. Son amour pour la révolution et la libération pour son peuple et les Noirs en général est sans mesure et sans calcul. Mais, paradoxe des paradoxes, cet homme meurt au moment même où François Hollande convoque les Chefs d’États noirs à Paris comme ses sous-préfets pour leur donner des leçons de «sécurité» et de «défense» en vue de mieux les exploiter! Pire, il meurt le jour même où l'armée française envahit une partie de l'Afrique pour une lugubre «opération de sécurité»! Ces actes, je n'en doute point, tuent davantage Mandela. Et puis, Alassane Ouattara se rend aux funérailles d'un homme de la dimension de Mandela pendant qu'il pourchasse, jette en prison et torture ses opposants après avoir conduit le plus illustre d'entre eux à qui il voue une haine terrible et inhumaine à la CPI et refuse la réconciliation dans son pays, quand il pratique une discrimination ethnique dans son pays! A -t-il seulement compris le message d'Obama affirmant qu'on ne peut pas se dire solidaire de Mandela et refuser ou mépriser les opposants de son pays?Vu toutes ces contradictions et cette comédie mondiale sous nos yeux, on peut légitiment se demander si l’œuvre de libération entreprise par Mandela en Afrique pourra lui survivre.
| |
|
|
|
|
|
|
|
Le retour
09/12/2013 20:19
Le retour
Au nom de notre foi renaît de ses propres cendres comme le phénix de la mythologie grecque. Ainsi pourrais-je qualifier volontiers le retour quasi inespéré et inattendu de cette rubrique hebdomadaire qui s'est acquis et même conquis quelques cœurs et esprits bienveillants pendant plus d'un an. En effet, il y a quelque quatre mois que votre rubrique à laquelle vous vous êtes habitués s'est éclipsée, contre la volonté de son modeste animateur que je suis. Les quelques messages que j'ai reçus dans ce sens s'inquiétaient de ce que j'étais devenu. Beaucoup ont même imaginé que j'ai reçu l'ordre de ma hiérarchie de me taire et de me contenter de dire les messes, sans plus. A beaucoup je n'ai pas voulu répondre à l'époque. Aujourd'hui, je puis leur dire clairement que depuis trois mois, je me trouve hors du pays pour des raisons d'étude. C'est la seule et unique raison de ce silence non mystérieux ou commandé. Habité par le désir de la formation et donc du savoir intellectuel, je suis maintenant en France pour préparer et soutenir une thèse de doctorat en théologie (dogmatique). Annoncer Dieu aujourd'hui et toujours exige un minimum de connaissance et de savoir aussi bien spirituel que livresque dans un monde de plus en plus exigent. C'est à cette exigence existentielle que je veux répondre en m'exilant pour ces études qui vont me prendre quelques années. Et puis, j'ai voulu aussi me donner quelques temps de repos après être sorti de ce cratère ivoirien, en m'habituant à d'autres choses comme le froid qui caille en ce moment dans l’hexagone.
Cependant, bien que désormais éloigné du chaud terrain politique du pays, et donc à mille lieues de là, de la réalité du terrain, je sens toujours le besoin sourdre en moi et même l'obligation de regarder, de lire et d'analyser la vie sociale et politique de mon pays à la lumière de ma foi chrétienne catholique que je revendique partout. Je suis fier d'être chrétien catholique et encore davantage prêtre. Et je me sens l'obligation de contribuer à l'avancée positive de ma société en y apportant et enseignant le message de paix et de libération de Jésus-Christ qui se résume en message de vérité et de salut. Surtout, quand les choses ne vont plus, quand le peuple est pris en otage par des illettrés parvenus et divinisés, quand il est maltraité et affamé comme cela l'est aujourd'hui dans mon pays, quand des dirigeants arrivent au pouvoir par les armes avec la complicité flagrante et insolente d'une coalition internationale pompeusement et injustement estampillée «Communauté internationale», quand ce pays est vendu et pillé par les multinationales guerrières qui exploitent, pillent et appauvrissent un peuple désemparé comme le mien l'est aujourd'hui, un chrétien et qui plus est un serviteur du Christ Libérateur, ne doit pas se taire et laisser le peuple de Dieu mourir d'injustice pendant qu'il se met au chaud dans sa sacristie. C'est ce que cette rubrique tente de faire, tant bien que mal, depuis plus de deux ans avec toute la modestie qu'il faut à une œuvre de libération. En décidant de reprendre la lutte (ou de déterrer la hache de guerre contre la médiocratie) là où je l'ai laissée il y a quatre mois, je veux marquer mon respect, ma fraternité et ma fidélité à tous les Ivoiriens qui souffrent dans leur chair, maltraités et torturés dans les camps de tortures éparpillés dans tout le pays, mon soutien sans faille aux combattants de la liberté et de la démocratie qui au milieu du «feu», de la «flamme» et de la «boue» résistent à la dictature armée d'Abidjan avec tout le risque de se retrouver «au cimetière» que leur réserve Ahmadou Soumahoro et son Rdr (le maître du Dire bien l'appelait «rd'hier»).
Au nom de notre foi revient donc pour prendre sa part de lutte dans l'imbroglio politique servi avec arrogance et grand tintamarre aux Ivoiriens par les bombardiers démocratiques installés par la clique sarkozienne. Si le pape François nous invite à mépriser et fuir «la mondialisation de l'indifférence», nous devons comprendre que la lutte contre cette indifférence doit être combattue partout où elle s'installe. Laisser l'injustice et l'exploitation des pauvres prospérer surtout sous nos tropiques par peur de la dictature et de la racaille installées dans les palais présidentiels, c'est refuser d'assumer son existence. L'on existe que parce qu'il lutte. Pour moi, la lutte contre l’injustice et la dictature ennoblit l'homme. Le Christ nous invite à lutter contre ce qui animalise l'homme. Contre une spiritualité de pure émotivité nous devons opposer une foi plus engagée là où l'homme est confronté aux problèmes quotidien de la mort. Telle est la mission que le Christ et l'Eglise assignent à leurs serviteurs que sont les prêtres. Je me suis inscrit depuis longtemps dans la logique et la dynamique de cette mission. Et je ne suis pas prêt à abdiquer.
Je voudrais remercier et rassurer tous les lecteurs qui se sont inquiétés pour moi un moment. Votre émotion est le signe de l'intérêt que vous portez à mes modestes réflexions consignées hebdomadairement dans cette rubrique. Je n'oublie pas les responsables de Notre voie pour leur confiance sans faille et leur respect à ma modeste personne. A partir de ce samedi et tant que la force me le permettra, vous retrouverez votre rubrique bien aimée dans le journal que vous tenez en main et sur mon blog.
| |
|
|
|
|
|
|
|
Le Mali et la Côte d'Ivoire
03/08/2013 00:26
Le Mali et la Côte d’Ivoire
Le Mali et la Côte d’Ivoire seraient-ils des victimes parfaites de ce qu’on pourrait appeler « le syndrome du bon voisinage » ? Tout laisse à le penser et même à le croire. En effet, en dehors de leur histoire qui est quasi identique sur bien des aspects, surtout social, politique et économique, les événements récents qu’ils vivent ces dernières années tendent à les « concilier » davantage. Retenons simplement l’ambiance spéciale dans laquelle le peuple malien a été convié- certains diront contraint- à choisir son nouveau président le 28 juillet dernier. L’œil du profane que je suis me fait voir une similitude parfaite avec ce que nous avons vécu chez nous il y a trois ans. Comme nous, en effet, les maliens ont été contraints par la France à aller voter dans un pays divisé entre son nord et son sud ; dans un pays où les armes circulent encore au vu et au su de tous ; où de nombreuses personnes sont en fuite ou en exil ou déplacés à cause de la guerre; où une rébellion traumatise encore le peuple ; dans un pays envahi par une cohorte de soldats étrangers pompeusement appelés « soldats de la paix » et où une « opération serval » nous rappelle notre triste « opération licorne » dont on connaît maintenant sa vraie mission en Côte d’Ivoire. Peu importe, il fallait, coûte que coûte, que les maliens allassent voter pour « obtenir la paix » afin que le pays devînt « normal ». Ceux qui sont allergiques aux termes pourtant capitaux d’indépendance, de souveraineté, d’autonomie, de patriotisme, … souffriront encore de me lire à travers cette rubrique. Le Mali avait-il vraiment besoin, dans l’état dans lequel où il se trouve en ce moment, d’un « président démocratiquement élu » pour « conduire sa destinée ? D’ailleurs, de quelle destinée s’agit-il quand un peuple est dirigé de l’extérieur par une bande de « puissants » qui régente les pauvres. De quelle indépendance peut-on parler en Afrique quand c’est le président français himself qui fixe la date des élections maliennes, en dicte les modalités, dresse la liste des candidats, fournit les « moyens financiers et humains » et conduit les « opérations de vote » ? J’ai entendu dire de la bouche des autorités françaises que les maliens devraient tous, « pour la paix », accepter obligatoirement les « résultats de ces élections » quelles que soient les conditions dans lesquelles elles se dérouleront ! Un ami avec qui je suivais cette actualité s’est instinctivement écrié « foutaise » ! En réalité, comment les occidentaux peut-ils éperdument se foutre de nous de cette façon ? Qu’est-ce qu’ils ont de plus que nous, en terme d’humanité, pour qu’ils règlent ainsi nos problèmes ? Tout ceci nous ramène à la Côte d’Ivoire où le même décor était savamment planté pendant toute la période qu’a duré notre guerre de pauvres. En vérité, le Mali et la Côte d’Ivoire, ainsi que tout le pré carré français sont dans le collimateur, mieux dans le viseur et sous l’emprise de leur tuteur et « aumônier » français. C’est lui qui a droit de vie et de mort sur les ressortissants de ces pays, c’est lui qui règle leurs biens et leur vie selon sa propre vision. C’est lui qui dispose sa « destinée ». C’est toujours lui qui choisit leur chef et leur gouvernant pour en faire ses « sous-préfets ». L’approche du Noir par le Blanc pose toujours problème. La race noire est-elle un appendice des autres races ? L’Afrique noire est-elle condamnée à vivre sa relation avec l’Occident dans l’humiliation quotidienne et sur ses propres terres ? L’intrusion intempestive et dramatique de la France dans la vie quotidienne des peuples africains qu’elle domine pose toujours et de façon récurrente et cruciale le problème même de la souveraineté de ces peuples dominés et humiliés. Quel est le seuil ou le degré d’autonomie que l’Occident veuille bien accorder à l’Afrique noire ? Ces questions sont déterminantes pour construire désormais et comprendre les relations entre l’Occident, surtout la France et nous. La « protection de ses ressortissants et de ses biens » que la France évoque toujours dans les conflits en Afrique pour s’imposer davantage est une préoccupation qui nous humilie sur toute la ligne et sur tous les plans. Cette thématique française qui manque de charité envers les pauvres surendettés que nous sommes doit ouvrir l’intelligence de ceux de nos frères qui ont en main la « destinée » de leurs peuples que nous sommes et doit sonner pour nous comme le moment d’une libération véritable des chaînes occidentales. Le mal pour nous est que nous ne sommes pas assez conscients que nous sommes des peuples vivant à la périphérie des autres qui nous malmènent de mille manières. Notre pauvreté, qui devrait pourtant susciter notre orgueil et nous mobiliser, nous rend au contraire amnésiques et bien souvent inconscients, prédisposés à la courbette et à la mendicité chroniques. « La grande nuit » dans laquelle notre pauvreté nous plonge est, pour ma part, le premier obstacle à notre autonomie et indépendance véritables. Les siècles de domination et d’humiliation que nous subissons n’ont aucun impact sur notre réflexion et notre agir. L’Occident, qui prétend être maître de notre « âme » et de notre « psychologie » profite de notre tiédeur pour éterniser et endurcir sa domination. Les cas de la Côte d’Ivoire et du Mali sont révélateurs d’une pathologie grandissante qui risque, dans un avenir très proche, d’emporter d’autres peuples embrigadés par l’Occident avec la bénédiction malveillante et inconsciente de certains de nos « frères » qui n’ont d’autre destinée que la rondeur de leur ventre. Nous ne cesserons jamais de dire qu’il nous faut, sous nos tropiques, une génération consciente qui brave tous les dangers et se rend capables de prendre les choses en main.
Commentaire de laloracorse2 (03/08/2013 07:24) :
tres bien explique mais j avoue avoir ete contre notre presence au mali, s
engager contre une guerre contre des islamistes, alors que la france sombre
doucement a cause de cette religion que je respecte quand elle est modéerée
moi je suis catho et je n impose rien, je suis ma voix amities
http://laloracorse2.vip-blog.com/
|
| |
|
|
|
|